
Dotées de la même mécanique, la TR2 et la Swallow Doretti étaient toutes deux promises à un bel avenir, mais c’est la Triumph qui a marqué son temps. Malcolm Thorne nous rappelle pourquoi, tout en s’interrogeant sur celle qu’il préfère.
La rareté. Quelle influence peut-elle avoir sur la façon dont une voiture est perçue ? Au niveau le plus prestigieux du monde des voitures de collection, c’est une qualité supplémentaire qui augmente l’exclusivité et provoque l’admiration. Mais en bas de l’échelle, dans les rangs des voitures de grande diffusion, cette caractéristique est souvent considérée comme une faiblesse. Les plus grandes réussites se traduisent par des milliers d’exemplaires et, lorsque les chiffres atteints sont plus faibles, le projet est considéré comme raté. Mais une faible production traduit-elle nécessairement un échec ? Si c’est le cas, la Swallow-Doretti devrait être considérée comme un fiasco, ce qui serait une cruelle injustice.
La vénérable Triumph TR2 est de loin la plus célèbre de ces deux voitures des années 1950, sa forme caractéristique étant facilement identifiable, alors que la Doretti n’est connue que d’une poignée d’amateurs avertis. Pourtant, le succès de la première n’a pas coulé de source. Tout en s’évertuant à trouver la recette que MG et Jaguar avaient appliqué avec tant de succès sur leurs voitures de sport, Triumph ne semblait donner naissance qu’à des projets faisant étrangement fausse route.
Le Roadster de 1946 était trop lourd, trop vieux et trop « joufflu » pour atteindre la cible et, si le prototype TRX présentée au Salon de Londres de 1951 constituait un projet audacieux, il était trop avancé et sans issu. Avec sa ligne effilée, ses phares escamotables et sa capote hydraulique, il était certes plus moderne que le Roadster, mais encore bien loin de la petite sportive abordable qu’attendait l’Amérique et dont le constructeur avait tant besoin. Le projet était donc abandonné, seuls trois prototypes ayant vu le jour.
Mais la troisième tentative se révélait bonne et les ingénieurs de Standard-Triumph tapaient presque dans le mille avec le projet suivant. En effet, la 20 TS respectait scrupuleusement un cahier des charges réclamant une conception simple et bon marché, et reprenant de nombreux composants existant. Elle comportait un châssis dérivé de la Standard Flying Nine d’avant-guerre, une suspension avant et un pont arrière de Triumph Mayflower, le tout complété d’un moteur et d’une boîte de vitesses de Standard Vanguard légèrement modifiés. L’ensemble était habillé d’une carrosserie dessinée par Walter Belgrove qui, à l’avant, affichait la forme et les yeux de grenouille caractéristiques des futurs roadsters TR mais dont l’arrière arrondi avec roue de secours apparente évoquait plus une voiture à pédale qu’une machine de sport. Comparée à une autre sportive britannique présentée pour la première fois au même Salon, l’Austin-Healey 100 dessinée par Gerry Coker, la Triumph affichait une forme bizarrement proportionnée.
[…]