Fiat 2800 Torpedo Reale

La Fiat des dignitaires

© Classic & Sports Car / James Mann

Fiat ne nous a pas habitués aux voitures d’apparat. Pourtant, le constructeur a produit juste avant la guerre 12 exemplaires de la Torpedo Reale destinée aux défilés officiels.

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La 2800 est la dernière nouveauté Fiat lancée avant la deuxième Guerre Mondiale. Même si nous ne connaîtrons jamais les machinations politiques ayant débouché sur sa présentation en 1938, nous pouvons hasarder quelques suppositions. A première vue, une telle limousine de petite série, à la forme inspirée des États-Unis, peut sembler bizarre pour ce constructeur en pleine expansion industrielle. Fort du succès de la 500 Topolino, Fiat est alors considéré comme une marque de voitures populaires et économiques, plutôt que d’automobiles statutaires pour despotes mégalomanes.

D’un autre côté, l’Italie fasciste étant de plus en plus présente sur l’échiquier mondial, et compte tenu du goût de Benito Mussolini pour les parades militaires, les autostrada et tout ce qu’offre l’automobile moderne, Fiat peut trouver un réel intérêt à mettre une imposante limousine à la disposition du gouvernement d’Il Duce. Cette voiture d’apparat peut contribuer à donner au groupe industriel le plus important d’Italie une notoriété inespérée sur la scène européenne de la fin des années 1930.

De même, la notion de Fiat de prestige a peut-être été présentée aux dirigeants de la firme de Turin comme une obligation ; après tout, Mussolini est le prototype du dictateur qui, en plus de faire arriver les trains à l’heure, a fourni à Adolf Hitler un modèle de conception du pouvoir. Les deux dirigeants comprennent l’importance de l’automobile comme moyen d’imposer leur autorité et, en finançant les équipes nationales de Grand Prix, de mettre en avant les prouesses technologiques de leur pays.

Mais si Hitler ne sait pas conduire et n’accorde pas à la course d’autre intérêt que de promouvoir la suprématie allemande, Mussolini est connu pour sa passion de tout ce qui a quatre roues et roule vite. En fait, quand il ne se pavane pas devant son public, il est dévoré par son addiction à la vitesse tout autant que par la poursuite de son autoglorification. Cela se manifeste par un style de conduite exubérant qui peut réduire ses passagers à un état de total épuisement nerveux, comme en a témoigné Enzo Ferrari qui s’est un jour rendu de Milan à Rome dans l’Alfa Romeo conduite par Mussolini.

Même son chauffeur personnel n’est pas un simple « conducteur », mais un pilote ayant remporté sa catégorie aux Mille Miglia, Ercole Boratto. Pour quelqu’un que nous pourrions aujourd’hui qualifier de « casse-cou », il peut sembler logique qu’il ait terminé sa vie pendu à une poutre au-dessus d’une station service, en avril 1945.

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