
Portant le nom d’un col célèbre, la Type 57 Stelvio fait partie des dernières vraies Bugatti sorties des ateliers de Molsheim.
Le coucher de soleil orange a laissé place à la pénombre, percée par le timide pinceau des phares. Les arêtes des rochers qui flanquent la chaussée ne sont émoussées que dans l’ombre qu’elles dessinent. Nous sommes seuls, avec la Bugatti et la montagne, envahis par des sentiments confus ; une sorte de fascination romantique pour cette voiture et ce qu’elle représente.
C’est une véritable machine à remonter le temps qui vous transporte juste avant la deuxième Guerre Mondiale et qui vous rappelle l’image de personnages distingués évoluant de palace en palace. Après tout, cette Bugatti était à l’époque une grande routière sans équivalent ; un vrai « pur-sang », avec tout ce que cela sous-entend. Dans les années 30 elle était l’exception, produite artisanalement et en nombre limité. Mais c’était aussi une vraie voiture de route, par opposition aux machines de course dotées d’une immatriculation.
Bien sûr, la Type 57 n’était pas la première Bugatti purement de tourisme ; regardez par exemple la voluptueuse Type 55 qui l’a précédée, ou l’énorme Type 41 Royale et son 8-cylindres de 12 763 cm3. Néanmoins, quand il a été dévoilé au Salon de Paris 1934, le modèle traduisait la volonté de proposer une voiture rapide et luxueuse, exclusivement destinée au tourisme, produite en petite série. Pour citer Hugh Conway, une des autorités en la matière : « Parmi toutes les Bugatti qui ne sont pas de compétition, c’est le modèle le plus célèbre. » Malheureusement, c’est aussi le dernier modèle vraiment nouveau qui soit sorti de l’usine de Molsheim.
Véritable œuvre d’art en soi, le moteur était conçu avec un souci obsessionnel du détail, de quoi vous faire vibrer d’émotion ; un 8-cylindres en ligne à deux ACT commandés par un train de pignons situé à l’arrière du moteur. Le bloc était entièrement nouveau, même s’il respectait la tradition Bugatti d’être à culasse non détachable. Avec une cylindrée de 3 257 cm3 (72 x 100 mm d’alésage x course), il développait 130 ch en version atmosphérique et jusqu’à 200 ch avec un compresseur type Roots. Le vilebrequin était à six paliers, le sixième étant dédoublé de part et d’autre du pignon de distribution. Les tous premiers châssis comportaient un essieu avant brisé, mais la plupart des voitures ont reçu l’essieu avant creux, traversé par les ressorts, caractéristique de la marque.
[…]