
Ces berlines ambitieuses ont apporté un peu de panache aux terrasses de cafés et aux stations d’autoroute de l’Angleterre des années 60.
Un arrêt à l’Ace Cafe London, au nord de Londres, donne l’occasion d’une petite pause. Et surtout, il faut garder un œil sur votre nouvelle voiture de fonction dans ce repaire de cafe-racers, car elle représente un acquis chèrement gagné. Les tournées de vente à bord d’un modèle bas de gamme appartiennent au passé et les chromes supplémentaires traduisent un statut plus flatteur.
De nombreux utilisateurs de Ford étaient sans doute persuadés, comme l’indiquait le catalogue, que la nouvelle Corsair était « Sophistiquée, décontractée, coriace — et, à l’extérieur, d’une sobre élégance. James Bond avec une touche de Peter O’Toole. » La réalité était probablement plus proche de Hugh Grant avec une touche de Mr Bean, mais ce dessin quasi-Thunderbird ne pouvait que faire sensation devant le café du quartier.
Pour Ford, la Corsair remplaçait la Consul Classic sur le segment D. Le président Terence Beckett pensait que le projet « Buccaneer » devait être une extension de la gamme Cortina dont il reprenait le pare-brise, les vitres et les entourages de portes. La Consul Corsair est apparue en 1963 et a perdu la première partie de son nom l’année suivante. En 1965, le V4 à 60° de 1,7 litre a remplacé le moteur Kent 1,5 litre, complété par le plus puissant 1 996 cm3 de la GT.
Selon Ford, la dernière Corsair était « La voiture que l’on voit, mais que l’on n’entend pas, » affirmation qui n’était pas partagée par tous les utilisateurs. Mais Rob Shand, propriétaire de la GT 1966 de cet article, apprécie le ronflement du V4. « Je pense que c’est un bon moteur, et ceux qui prétendent qu’il est rugueux le connaissent mal, » indique celui qui, en 2008, a extrait sa Ford Saluki Bronze du jardin où elle se languissait.
Passionné de Corsait depuis l’âge de 16 ans, il considère que ce modèle est très sous-estimé par rapport à la Cortina. Avec ses discrets insignes d’ailes arrière, cet exemplaire rappelle à quel point de nombreuses Ford sportives des années 60 étaient peu tape-à-l’œil. L’habitacle est tout aussi fonctionnel, des équipements trop abondants risquant d’empêcher le propriétaire de souhaiter passer à la Zodiac. Ford proposait des Corsair encore plus simples avec commande de vitesses au volant, mais Shand préfère le levier au plancher de la GT.
Dans Motor Sport, Bill Boddy déplorait que, si la Corsair était une « berline bien équipée et bien finie », la GT était une « tragédie ». Pourtant l’utilisateur moyen était moins préoccupé d’être le prochain Graham Hill que d’arriver à l’heure à ses rendez-vous.
La production a cessé en 1970 quand la Corsair a été remplacée par les versions haut de gamme de la Cortina MkIII. Aujourd’hui, elle représente une version oubliée du futur, faite de voies express, de costumes en Tergal et de distributeurs de boissons. Sans oublier une apparence « qui a autant de panache que son nom le suggère. »
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