
Chef-d’œuvre qui offrait abondance de puissance et de luxe, la Lagonda V12 était une des voitures les plus chères du marché. Ses qualités impressionnent encore aujourd’hui.
Si, en étudiant faits et chiffres, vous pouvez généralement imaginer les impressions que procure la conduite de la plupart des voitures anciennes, cela donne parfois le sentiment qu’il ne reste pas beaucoup de surprises à découvrir.
Blasé ? J’espère que non. Mais je ne peux nier que le nombre de voitures que je n’ai jamais essayées et qui gardent une part de mystère sont de moins en moins nombreuses. L’inventaire reste toutefois conséquent : les 250 GTO et GT 40 en font partie, et qui refuserait une place dans le coupé 300 SLR Uhlenhaut ? Mais toutes les candidates ne sont pas forcément rares, puissantes et chères, ni même désirables au sens conventionnel. Les Skoda à moteur arrière ou les Bond Bug viennent à l’esprit tout aussi spontanément, de même quelques lourdes machines des années 1930 qui ne sont pas forcément dans ma zone de confort, la période d’après-guerre.
Il faut être prudent sur ce que l’on souhaite.
J’ai détesté la seule Duesenberg que j’ai conduite, et suis préparé à être déçu par des bizarreries comme les Autovia ou Crossley Burney Streamline, qui sont rares probablement pour de bonnes raisons. C’est une liste en perpétuelle évolution, mais il y a une voiture dont l’attrait et le mystère n’ont pour moi jamais diminué, c’est la Lagonda V12.
Comme toutes les meilleures voitures, elle est riche d’une belle histoire. Le magnat haut en couleur Alan Good a sauvé Lagonda en 1935 et y a fait venir un WO Bentley désabusé, dont le contrat avec Rolls-Royce arrivait à son terme. Encouragé par la victoire de la marque aux 24 Heures du Mans cette année-là, le nouveau patron a annoncé à ses employés de Staines qu’ils allaient produire « la meilleure voiture du monde ». Et, d’une certaine manière, ils ont réussi.
Le nouveau V12 de WO Bentley ne s’embarrassait pas de compromis et ne se souciait ni de coût ni de prix de vente. A un peu moins de 1 200 £ (en berline usine), cette voiture dépassait l’imagination, à une époque où une Austin Ruby était vendue 125 £ et où le salaire annuel moyen était inférieur à 200 £. Mais tout dépendait de votre point de comparaison : l’autre supercar anglaise à moteur V12 de la même époque (la Rolls-Royce Phantom III 7,3 litres) coûtait 2 600 £ en châssis nu.
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